Le matin pointait doucement le bout de son nez. Le soleil se levait paresseusement et il ne fallait pas être pressé pour pouvoir le contempler. Les premiers rayons traversèrent les arbres et vinrent frapper le visage d'Alice qui, jusque là, dormait paisiblement. Ils agressèrent ses yeux et il lui fallut un moment pour s'habituer à la lumière du jour. Alice venait de trouver un petit toit mais comme d'habitude, elle n'allait pas y rester longtemps. Elle était toujours en mouvement. Peut-être pour échapper à ses ennemis ou à ses peurs ? Une fois accoutumée à la nouvelle lumière, elle se leva et s'habilla. Elle mangea en vitesse car elle voulait partir de là. Elle laissa la maison comme elle l'avait trouvé : abandonnée à la lisière du bois. Après avoir fermé la porte, elle sella sa jument, attacha son petit sac, qui contenait ses affaires, à l'arrière de la selle et se mit en route.

Sur le chemin, un peu usé par le temps, elle se remémora son passé. Après la mort de sa famille, enfin celle qui lui restait, elle avait fuit Cair Paravel mais sans vraiment s'en éloigner car cela restait son lieu de naissance et le symbole de son enfance. Cair Paravel représentait tout pour Alice : son passé, son présent mais aussi son futur. Lorsqu'elle avait fuit, elle ne savait pas où aller. Élever par trois hommes, elle avait appris à vivre dans la nature, sans personne. La première nuit, elle se cacha en haut d'un arbre, à l'abri de tout danger puis petit à petit elle se rapprocha des villages pour finir par faire quelques boulots à droite et à gauche. C'est pendant sa première nuit, seule au monde, sans soutien, qu'elle trouva son but : Caspian X. Caspian fut le symbole de sa douleur. Elle ne savait pas pourquoi il avait agit ainsi. Elle l'avait croisé durant son enfance, lorsqu'elle était de passage au palais des Rois et Reines. A cette époque, lui et Susan s'aimaient. Et elle les enviait beaucoup. Elle n'avait pas l'intention de le tuer car elle ne voulait pas se mettre à dos tout les peuples. Elle voulait juste le retrouver et lui mettre une bonne racler. Rien de plus.

Cela faisait 1h30 qu'elle et sa jument marchaient et la douleur aux jambes se faisaient ressentir pour les deux. Alice arrêta sa monture et la laissa brouter et se dégourdir les pattes. Alice en profita pour se changer : elle avait mis une robe blanche en vitesse mais à cheval, cette tenue n'était pas pratique. Elle opta pour un pantalon en cuire brun, un haut blanc et un corset brun. Et elle détacha ses cheveux pour les laisser courir sur le haut de son corps. Après avoir fait ce petit changement, elle se remit en selle, direction la plage. Elle n'était pas pressée d'y arriver et c'est donc tranquillement qu'elle prit cette direction. Etant une jeune femme agile, elle lâcha les brides de sa jument pour regarder si son arc n'était pas abîmé et le cala dans son dos avec son carquois.

Lorsque l'air salé arriva jusqu'à elle, elle se sentit libérée. L'eau était un élément magnifique et qu'il fallait respecter si on ne voulait pas recevoir ses foudres. La plage était en vue. Elle s'arrêta, laissa sa jument cachée sous les arbres et descendit le reste à pied. Elle y allait doucement pour regarder si personne ne la surveillait ou si quelqu'un voulait lui tendre un piège. Elle était très méfiante à ce niveau-là. Et enfin le sable et ses bottes entrèrent en contact. Elle marcha près de l'eau et le bruit des vagues qui venaient se fracasser sur le sable avait un effet apaisant. La tête ailleurs, c'est alors qu'elle remarqua une silhouette devant elle. Son sang ne fit qu'un tour. Ses réflexes prient le dessus sur sa raison : elle prit son arc et tira une flèche en direction de la silhouette. Puis elle se rapprocha de celle-i pour voir les traits de son propriétaire : Caspian !

Alice manqua sa cible de peu. Et zut ! Mais par chance, Caspian ne s’attendait pas à recevoir une flèche en guise de bienvenue et il tomba de son perchoir et atterrit lourdement sur le sable mou. Mais il ne perdit pas une seconde, pour autant : d’un bond spectaculaire, il se remit sur ses deux pieds et dégaina son épée en la pointant vers la jeune femme. En la voyant de plus près, il parut de découvrir que son agresseur était en réalité une femme mais Alice ne prit pas en compte ce petit moment de surprise. Pendant qu’il était tombé, Alice sortit une dague de sa botte droite et menaçait aussi son adversaire.

Ils se firent face durant un moment. Durant ce lapse de temps, Alice en profita pour étudier l’homme qui se tenait debout, en face d’elle. Il n’avait pas beaucoup changé depuis la dernière fois qu’elle l’avait vu. Il avait une barbe de trois jours, bien taillée pour quelqu’un qui se fait pourchasser toute la journée. Il avait le teint un peu plus bronzé mais cela était sûrement du à ses nombreux voyages. Il avait aussi la mine fatiguée : il ne devait pas se reposer souvent. Alice faisait ses petites constatations du jour. Puis, elle s’attarda sur les yeux de Caspian : il avait un regard dur, sévère et fier. Pourtant, à chaque fois qu’elle le voyait, lorsqu’elle était un peu plus jeune, il avait un regard doux et séduisant, mais ça c’était lorsqu’il regardait Susan. Ses petits yeux, de couleur noisette, réfléchissaient son intelligence et sa fierté en tout temps.

- Qu'est-ce que je vous ai fait à vous pour que vous vouliez me tuer ?, dit-il.

Alice baissa son arme et la rangea dans sa botte droite. Elle ramassa son arc et son carquois qu’elle avait laissé tomber lorsqu’elle avait empoigné sa dague. Elle remit son carquois dans son dos mais garda son arc dans la main, au cas où. Avec les hommes, on ne sait jamais ce qui peut arriver. Puis, elle avança sa main pour faire pression sur l’épée de Caspian et l’obligé à la baisser. Il n’y avait plus de raison pour qu’il tienne un objet dangereux face une femme désarmée, désormais. Une fois fait, elle le regarda dans les yeux et lui dit doucement :

- Ce que tu as fait ? Mais la même chose à tout le monde : causé la mort de beaucoup d’innocent en déclarant cette guerre, dont tu te souviens à peine. Je ne te reconnaissais plus lorsque tu as lancé l’assaut contre Narnia et Archeland. Surtout lorsque tu as décidé de t’allier à Calormène. Mais ce qui m’a le plus déçut, c’est lorsque tu as tué, de sang-froid, le Roi Peter. Tu sais je t’ai hais pendant longtemps, comme tous les autres. Mais je t’ai pardonné car, après tout, l’erreur est humaine, n’est-ce-pas ? Je pense que peu de personne ne t’as pardonné ton geste, jusque-là. Je me trompe ?

Elle s’arrêta un instant, pour guetter la réaction et les émotions qui défilaient sur le visage de Caspian. Puis, elle se souvint de la question que lui avait posée ce dernier juste avant.

- Mon intention n’était pas de te tuer. J’ai beau être une jeune femme bien entraîner à survivre et à se battre, je n’ai pas vraiment l’âme d’une tueuse. Mais s’il faut tuer, alors je le ferais, sans hésitation. Mais tant que je peux préserver la vie, je le fais au maximum. Je te cherche depuis des années. Cela fait bientôt 2 ans que je suis partie à ta recherche. Bien sûr, tu me diras pourquoi avoir miss tout ce temps. Et bien parce que j’avais besoin de réfléchir et que j’étais sûre que tu allais revenir à Narnia. Tu ne me reconnais pas on dirait ?

Lorsqu’Alice prononçait ses paroles, l’ancien roi de Telmar détourna son regard dur, sévère et fier. Alice savait que ce qu’elle prononçait était dur pour Caspian. Mais il fallait qu’elle lui dise ce qu’elle avait sur le cœur. Il fallait qu’elle le fasse pour pouvoir le pardonner encore plus qu’elle ne l’avait fait. Il ne voulait pas la regarder, du moins, c’est ce qu’elle en déduisit. Il préféra fixer la mer qui s’étendait devant eux. Elle était plutôt calme. Elle le vit s’avancer jusqu’à elle, jusqu’à que ses bras viennent lui mouiller ses bottes. Il avait l’air d’enregistrer les paroles de la jeune fille, tout en essayant de se concentrer. Ses cheveux dansaient autour de lui : cela lui donnait un air de roi qu’il n’avait jamais perdu. Là, il lui annonça qu’il regrettait ce qu’il avait fait dans son passé. Il savait une partie de ses actes mais d’autres étaient encore enfouis au fond de lui et ne voulaient, visiblement pas, sortir de là. Il lui annonça aussi qu’il n’était pas revenu à Narnia pour se refaire une jeunesse. Il était arrivé là par pur hasard car il essayait de fuir des soldats Telmarins.

Il ne détourna point son regard de la mer. Il n’avait pas réagi lorsqu’elle lui avait dévoilé son nom. Il ne se souvient plus du tout de moi ? Soudain, il se frotta le front avec une de ses mains pour essayer d’effacer quelque chose. Il fit une sorte de grimace puis essuya en vitesse sa joue. Mais il ne fut pas assez rapide : Alice eut le temps de voir une larme se former au coin de son œil. Pendant un instant, elle eut pitié pour lui. Tout ce qu’il avait vécu dans le passé, il ne s’en souvenait plus. Elle n’était pas très glorieuse mais il fallait qu’il retrouve la mémoire. Et sa vie de maintenant se résumait à essayer de fuir tous les gens qui voulaient le voir mort et enterré. Avec ou sans sa mémoire, ses deux vies avaient un seul point commun : la haine de ceux qui voulaient le voir à terre, dans les bras de la faucheuse.

- En effet, votre nom m’est inconnu. Je suis navré, je ne sais même pas moi-même quels sont mes amis… ou mes ennemis…

Une bourrasque de vent vient décoiffer la jeune femme. Ses cheveux valsèrent autour d’elle. Elle lui fit un sourire. Un sourire doux et emplit de compassion. Elle ne comprenait pas ce qui lui arrivait. Lui avait-elle pardonné ? Apparemment, ce n’était pas loin. Mais elle ne savait pas si c’était un bon choix. Un jour venu, il recouvra toute sa mémoire, même la plus profonde. Personne ne garantit que ce jour-là, il ne refera pas ses erreurs. Caspian était connu pour apprendre de ses erreurs. Il avait été naïf et soumis à Jadis. Mais Alice croyait en Caspian, même si elle l’avait hait pendant très longtemps.

- Dans ton passé, je passais souvent au palais de Cair Paravel. Je venais voir la Reine Lucy. Je te voyais de temps en temps. On se parlait et se voyait peu mais je t’ai toujours considéré comme un ami. Je m'appelle Alice Idril Lessien mais tout le monde m'appelait et m'appelle Alice.

La jeune femme fit resurgir ses souvenirs. Lorsqu'elle rendait visite à Lucy, ce qui arrivait souvent, elle aimait passer des heures dans la cour du palais de Cair Paravel et regarder les soldats s’entraîner ou regarder passer les gens. Des fois, quand Caspian daignait se montrer, elle courait vers lui et se mettait à faire des cabrioles autour de lui. Et devinez ce qu'elle allait faire maintenant. La même chose : elle fit les mêmes mouvements que lorsqu'elle était enfant, dans l'espoir de faire revenir la mémoire de l'ex-roi Telmarin.

Au bout de quelques minutes, à bout de souffle, elle cessa ses enfantillages et s'écroula à terre. Elle reprit calmement sa respiration. Elle espérait que ce qu'elle venait de faire ferait revenir la mémoire à Caspian mais elle n'enétait pas sûre. Alors, au lieu de le regarder et attendre, elle fixa à sont tour la mer et les vagues. Une enfant qui sautille comme ça ne peut pas s'oublier !

- Lorsque je venais au palais et que je te voyais, je sautillais autour de toi. Alors, j'espérais, qu'en refaisant cela maintenant, cela t'aiderait mais j'ai l'impression que je viens de passer pour une idiote à tes yeux.

Alice l'entendit rire pendant sa prestation, si on peut appeler ça une prestation. Cela faisait des lustres qu'elle ne l'avait entendu rire. Comme quoi : une simple danse peut faire sourire et rire les plus malheureux. Contrairement à ce qu'elle aurait pensé, elle parvint à atteindre son but : faire revenir la mémoire de Caspian à son sujet. Elle en était plus qu'heureuse. Sur ses lèvres, un énorme sourire de satisfaction se dessina et ses yeux pétillèrent de joie et de bonheur.

Alice était toujours assise dans le sable, à se reposer. Il faut dire que faire ce genre de chose n'était plus trop de son âge, bien qu'elle soit encore jeune et souple. Le soleil en était à son zénith. Il réchauffait le visage de la jeune ex-narnienne et celui de l'exroi de Telmar qui venait de se tourner vers la mer. Il avait perdu le regard qu'il avait au départ, à l'égard d'Alice. Maintenant, il y avait un soupçon de joie. Et Alice en était heureuse pour lui : elle venait d'illuminer sa journée ! Il se retourna vers elle et lui tendit sa main.

- L'heure du déjeuner approche, et je dois avouer que je n'ai rien manger depuis hier. Ces bois-ci doivent être remplis de gibier, qu'en dis tu ? Mais si tu as une meilleure solution je te laisse choisir

Il avait raison. Le ventre d'Alice gronda en signe d’acquiescement. Elle posa les yeux sur la main que lui avait tendu Caspian. Il était là, planté devant elle à attendre sa réaction. Elle avait déjà touché et pris cette main dans le passé. Elle savait qu'elle en craignait plus grand chose avec lui. Alors c'est doucement et sans se brusquer, qu'elle glissa sa main droite dans celle de Caspian. Elle sentit une force la tirer vers l'avant et la seconde suivante, Alice était debout face à Caspian. Elle était proche de lui, sa main toujours dans la sienne. Elle ne l'avait jamais approché et regardé de si près. La situation devint vite gênante pour la jeune femme. A part son père et ses frères, aucun homme ne l'avait approché d'aussi près. Leurs corps n'étaient qu'à quelques centimètres l'un de l'autre et par réflexe, Alice avait posé sa main sur le torse de Caspian lorsque celui-ci l'avait tirée du sable. Elle le regardait dans les yeux et cherchait quelque chose à faire pour se sortir de cette situation.

- Hum .... Elle retira sa main du torse du jeune homme et recula d'un pas en arrière. Puis, elle chassa le sable qui s'était collé à son pantalon, nerveusement. Puis regarda derrière elle. Le vent vint la décoiffer de nouveau et elle sentit ses cheveux fouetter, doucement, le visage de Caspian. Elle aperçut sa jument, à l'ombre des arbres.

- Je pense qu'à cette heure de la journée, le gibier ne doit pas manquer. Je n'ai pas mieux à te proposer. Je pense que ton cheval est derrière cette petite montée. Et si tu allais le chercher ? A côté du chemin par lequel tu es passé, il y en a un autre qui monte vers la forêt. Je t'attendrais à cet endroit avec ma jument.

Sur ces paroles, elle ramassa son arc et partit lentement vers sa jument. Arrivée à elle, sa jument vint chercher une caresse. Alice lui remit la selle qui était posée au pied d'un arbre et remonta à cheval. Elle ne la pressa pas et laissa tomber les rênes. La jument partit doucement au pas dans la direction qu'Alice lui avait donnée. Quelques minutes plus tard, elle arriva en au du petit chemin et vit Caspian monter. Lorsqu'il arriva à sa hauteur, un buisson bougea droit devant eux. Alice descendit aussitôt de son cheval, pris une flèche dans une main et son arc dans l'autre.

- Le premier qui attrape une proie a gagné.

Puis elle s'élança droit dans la forêt. Elle venait de pimenter leur journée : un petit défi ne fait pas mal.

Alice avait à peine sortie sa phrase qu'elle avait déjà bandé son arc et sortit une flèche. Elle s'apprêtait à s'élancer en direction du buisson qui venait de bouger lorsque Caspian lui barra la route. Il ramassa un caillou trouvé par terre et le lança en plein sur le buisson en question. Un lièvre énorme et dodu détala de son endroit. Puis, fier de sa bêtise, il remonta en selle et se mit à talonner son cheval à la poursuite de l'animal, visiblement effrayé.

Alice le regarda détaller. Elle étouffa un juron mais le jeune homme était trop loin pour l'entendre. Il ne changera jamais ! Toujours aussi enfant dans sa tête. Elle enleva sa flèche, détendit son arc et le remit dans son dos. Elle laissa sa jument paître tout en sachant qu'elle ne partirait jamais sans sa cavalière et que si quelque chose lui arrivait, l'équidé saurait retrouver Alice dans cette forêt. Un lien les unissait. Un lien indescriptible et merveilleux à la fois. Un lien qu'Alice a mis beaucoup de temps à construire et à consolider pour en arriver à ce stade.

C'est pensant à ce lien qu'elle partit dans la forêt. Elle ne savait pas où elle allait exactement mais marcher dans la forêt lui donnait le temps de réfléchir. C'est donc sans but, qu'elle erra dans cette magnifique forêt qui s'offrait à elle. La terre n'était ni trop sec, ni trop humide. Les arbres étaient encore nus à cette saison mais les épineux résistaient. Le sol était marron et gris à certain endroit, couleur de la roche. On pouvait entendre le pépiement des oiseaux les plus courageux pour braver la saison froide. C'est dans cette atmosphère qu'Alice se perdit dans ses pensées.

Elle pensait à Caspian et à sa facilité à le pardonner. Bien sûr il avait été l'élément déclencheur de ses cauchemars. La mort de son père et de ses frères et la colère qu'elle avait eu à l'égard de l'ancien roi. Mais, depuis toute petite, elle l'avait considérer comme une sorte de "Grand Frère". Et puis, lorsque ses deux frères rendirent l'âme sur le champ de bataille, Alice considéra vraiment Caspian comme son Grand Frère. Puis, elle apprit qu'il était le début de ses malheurs familiales et tout changea. Tout ? Presque. Au fond d'elle, il était toujours son Grand Frère. Et cette rencontre confirma cette sorte de lien. Elle l'avait pardonné un peu trop vite mais elle ne le côtoyait pas tous les jours. Elle ne savait pas si il avait fait autre chose que déclencher cette bataille.

Le ventre d'Alice gargouilla et la ramena à la réalité. Elle avait marché pendant longtemps et avait très faim. Caspian a sûrement attrapé le lièvre. Au détours d'un arbre, elle tomba sur un petit buisson fruitier. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas mangé de baies. Elle s'agenouilla au pied du buisson et identifia les baies : elles n'étaient pas empoisonnées. Elle prit un bout de tissu qu'elle avait sur elle et prit quelques baies pour compléter le repas. Elle trouva un petit ruisseau et les lava. Puis elle retourna près de la mer, là où Caspian l'attendait avec un feu.

Il était en train de préparer la bête lorsqu'Alice débarqua. Elle le regarda et secoua la tête. Elle alla s'asseoir à côté de lui mais pas trop près puis elle déposa les baies sur ses genoux. Elle les essuya soigneusement, en faisant attention à ne pas les abîmer puis les déposa entre Caspian et elle. Pour finir, elle essuya ses mains et les réchauffer un petit peu au près du feu. Elle regarda l'ancien roi faire.

- Tu es vraiment un tricheur ! C'est pas du jeu de lancer un caillou en direction du buisson ! En plus, tu as fait peur au lièvre.

Elle se leva et faisait comme si elle boudait Caspian. N'arrivant pas à garder son sérieux devant cette scène, elle explosa de rire. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas ri avec lui. Elle se dirigea vers sa jument pour voir si tout allait bien et lui donna quelques baies qu'elle avait gardé pour elle. La jument les renifla et les mangea avec plaisir. Elle en donna aussi au cheval de Caspian mais ne le connaissant pas très bien, elle préféra déposer les fruits sur un rocher pour que l'animal puisse les manger sans problème. Puis, elle retourna s'asseoir. Le lièvre était en train de rôtir sur les flammes et une délicieuse odeur de viande grillée commençait à flotter dans l'air.

- Dit ... Pour ce qui c'est passé sur la plage tout à l'heure ... Ce n'était pas dans mon intention. Je suis désolée si je t'ai mis mal à l'aise. C'est juste que ...

Elle se mit à rougir doucement ce qui lui donnait un certain charme. Et il ne laissait personne indifférent. Elle n'arrivait pas à finir sa phrase. Elle était trop gênée de ce qui c'était passé sur le sable. Elle toussa un peu et entreprit de se recoiffer un peu. Elle plaça ses cheveux correctement sur les côtés et les laissa tomber et encadrer son visage.

- Et sinon, tu comptes partir de Narnia ? Si c'est le cas, où iras-tu ? Moi j'ai l'intention de partir pour Telmar demain. Il paraît que l'architecture est à couper le souffle.

Caspian semblait mal à l'aise lorsqu'Alice remit sur le tapis la scène de la plage. Mais ce n'est pas cela qui la frappa : c'est le voile noir qui vint couvrir ses beaux yeux noisettes. Elle ne comprenait pas cette réaction. Peut-être avait-il vécu une expérience douloureuse. Peut-être qu'il ne se souvenait pas de Susan et que cela le mettait en colère. Alice n'e savait rien et quand le jeune lui assura qu'il ne fallait pas qu'elle s'inquiète pour lui, elle n'insista pas. Elle préféra le laisser tranquille avec ses pensées et sa mémoire. Il ajouta un léger sourire pour lui assurer que tout allait bien.

Lorsqu'elle apprit que lui aussi allait à Telmar, Alice retrouva toute sa joie et sa bonne humeur. Ils pouvaient peut-être faire le voyage ensemble, ce qui serait vraiment excellent pour la jeune femme. Caspian lui confirma que, en effet, l'architecture de la ville était très belle. Elle savait qu'il n'était pas né à Narnia mais elle ignorait qu'il avait vu le jour à Telmar même. Elle fut vraiment surprise de l'apprendre. Après tout, elle ne lui avait jamais posé la question. Mais elle ne le laissa pas paraître.

Une bonne odeur de griller envahit bientôt toute la forêt. Le lapin était cuit et Caspian en prit deux morceaux et pas n'importe lesquels ! La cuisse du lapin était un morceau de choix. Il souffla sur la cuisse qu'il tendit ensuite à la jeune femme. Elle porta le morceau à sa bouche et en prit une petite bouchée : la viande était bien tendre et était tellement délicieuse qu'Alice savourait chaque bouchée. Ce n'est pas tous les jours qu'elle mangeait du lapin. D'ordinaire, c'était du pain vieux de deux jours, quelques fruits et un peu d'eau. Les deux amis mangèrent tranquillement lorsque Caspian remit la discussion du voyage à Telmar sur le tapis.

- Veux-tu vraiment aller a Telmar ? Elle est très jolie certes, mais s'ils savent que tu es narnienne ils te feront du mal. Ne serait-ce pas plus sage de rester a Narnia, ou de retourner à... Cair Paravel ? Tu sera en sécurité entre les mains d'Edmund... Et je serais rassuré.

Alice faillit s'étouffer avec son morceau de viande pourtant petit. Caspian venait de lui dire qu'il s’inquiétait pour sa sécurité et sa vie. Alice n'en revenait pas ! Personne ne s'était préoccupé de la vie d'Alice depuis des années. Depuis que son père et ses frères avaient quitté ce monde. Elle tourna lentement la tête et regarda Caspian avec des yeux ahuris. Elle était heureuse que quelqu'un se préoccupe d'elle mais elle ne voulait pour rien au monde, rester une minute de plus à Narnia. Elle avait besoin de changer d'air et de voir du pays.

- Ne m'en veux pas mais j'ai besoin de changer d'air. J'ai besoin de quitter Narnia pour ne serait-ce que trois malheureux jours. J'ai besoin de retrouver la sensation de liberté que j'avais dans mon passé.

Caspian avait fini sa cuisse et se leva. Alice termina la sienne, s'essuya les mains et sa bouche avec un petit mouchoir en tissu. Puis elle prit quelques baies qu'elle avait soigneusement lavées. Elle vit Caspian reculer doucement sans quitter la belle des yeux. Que va-t-il encore me sortir celui-là ? Il prit son épée et regarda Alice avec son regard espiègle qu'il avait lorsqu'il voulait engager le combat pour le plaisir.

- Tu veux jouer à ça ?, fit-elle avec les yeux rieurs et un grand sourire.

Elle se leva doucement, se baissa et plongea ses deux mains dans ses deux bottes de cuir bruns. Elle en ressortit deux magnifiques dagues. Elle le empoigna fermement et se jeta sur Caspian tel un fauve sautant sur sa pauvre proie. Et le combat commença.

Alice s'était jetée corps et âme sur Caspian pour ce petit duel amical. Elle avait ses deux dagues, une dans chaque main afin d'être sûre que lui et elle était au même niveau : une épée vaut bien deux dagues, non ? Mais elle était loin, même très loin de se douter de ce qui allait se passer durant ce match.

Elle attaqua la première sans laisser de temps à Caspian. Elle donnait de petits coups habiles sur les flancs du jeune roi déchu. Il recula, bascula et faillit tomber à terre mais il se réceptionna avant. Cela aurait été une occasion en or de lui montrer de quoi elle était capable. Même si elle fut bien entraînée, elle ne faisait pas le poids face un roi et guerrier. Mais elle tenait bon. Elle était frustrée et surtout agacée par l'attitude qu'avait l'ancien roi de Telmar. Il était souriant, rigolait comme ça et il adorait la taquiner. A chaque coups, il réussissait à toucher le bras ou l'épaule d'Alice alors qu'elle, elle mettait des coups dans le vent. Plus elle en mettait plus elle était énervée et plus elle forçait. Si bien qu'à un moment, des petites perles de sueurs tombaient sur son doux visage qui était maintenant écarlate.

Puis tout à coup, sans qu'elle y comprenne quelque chose, les rôles s’inversèrent. Caspian attaquait tandis qu'Alice essayait tant bien que mal de se défendre. Les coups étaient précis et rapide. Tellement précis qu'il fit voler la première dague puis la deuxième avec une telle violence qu'Alice tomba à terre, l'épée pointée juste devant ses yeux. Elle regarda Caspian : il était devenu noir et colérique. Il avait pris une posture d'attaque, comme lorsqu'on veut mettre à mort à soldat qui est à genoux. Le visage du jeune homme dégoulinait et sa respiration était tellement forte que ses épaules bougeaient s'en arrêt.

Alice était à terre, fixée sur le sol avec une épée et un homme face à elle. Son coeur battait la chamade, ses membres tremblaient et elle était apeurée. Elle ne savait pas ce qui se passait. Elle ne savait pas pourquoi Caspian avait soudainement changé d'attitude et s'en était pris à elle. Le combat ne devait être qu'un combat amical et rien de plus. Ni vengeance ou autre n'étaient prévus au rendez-vous. Lorsque Caspian revint à lui ou redevint normal, Alice alla récupérer ses deux dagues enfoncées dans la terre, enleva les morceaux de terre et autre de sa tenue avant d'aller s'asseoir toute tremblante sur le rocher où elle avait mangé son lapin et ses baies. Caspian s'était assis lourdement sur le sol après avoir baissé la garde. Ses yeux étaient rouges. La jeune femme ne savait pas quoi faire dans ce genre de situation, si bien qu'elle laissa les choses couler.

- Alice... As tu déjà été confronté a deux choix qui te conduiraient sur deux chemins différents ? Commet as tu réfléchis a ta décision ?

Un étrange oiseau venait d'apparaître. Il était beau et majestueux et il ne semblait pas agressif. Au contraire, l'animal se dirigea droit vers Caspian et se posa à côté de lui. C'était une bête magnifique et le jeune homme ne semblait pas surpris par son arrivée. Alice était attendrit devant ce beau spectacle : apparemment, Caspian devait être le maître de cet oiseau puisque ce dernier se laisser faire lorsqu'il approchait sa main ou autre. Jamais de sa vie Alice avait vu un phœnix et un humain aussi proche.

- Deux chemins différents ? Comme le bien et le mal par exemple ? C'est sûr que ce ne sont pas des choix faciles à faire mais si tu dois en faire un, il faut que tu essayes de te projeter dans le futur de tes deux choix. Regarde celui où tu te sentirais le plus à l'aise. Pèse le pour et le contre. Et parles-en avec quelqu'un. C'est comme ça que je fais et regarde où cela m'a mené.

HS: